Bouneau UE2 5ème cours 26/10/06
Sommaire
L'innovation et le cercle vertueux de la seconde industrialisation
La notion de système technique au cœur du développement économique et social
- La notion de système technique a été travaillée par Schumpeter et G.Mensch le disciple de ce dernier en France est l’historien Bertrand Gilles auteur de L’histoire des Techniques . D’autres historiens ont travaillé sur ce thème notamment Hughes dans son ouvrage Network of Power et aussi F.Carron Les Deux Révolutions Industrielles (il prépare pour 2007 Une nouvelle histoire des techniques).
- Un système technique peut être défini comme un ensemble d’éléments techniques interdépendants qui structurent l’économie, génèrent de nouveaux produits et de nouveaux procédés et contribuent au développement de la société.
- Pour la première révolution industrielle, les deux systèmes techniques dominants sont le textile et la sidérurgie. Cela a constitué un paysage spécifique, en effet on le constate aisément il y a une forme spatiale de cette industrialisation ,voir les grands bassins industriels, ce sont les « black counties » en Angleterre, les corons au Nord ,il y a une forme d’habitation spécifique, on utilise le terril (résidus d’exploitations) pour la construction. En image de fond il suffit de visualiser l'image des hauts-fourneaux.
- Il y a des effets de continuité entre la première et la deuxième révolution industrielle, cela est particulièrement net pour la sidérurgie, elle appartient à la fois à la fin de la première révolution industrielle et au début de la deuxième. Le procédé de fabrication de l’acier remonte à 1856, mais la sidérurgie ne se spécialise qu’à la fin du XIXe siècle sur de nouveaux matériaux. A partir de 1878 on utilise un nouveau procédé celui de T.Gilchrist pour traiter les minerais à haute teneur en phosphore.
Les deux systèmes techniques de la seconde révolution industrielle sont la chimie et l’électricité.
- La chimie est à cheval sur les deux révolutions industrielles. En 1860 le belge Solvay met au point un nouveau procédé de fabrication de la soude qui bouleverse les bases économique de la chimie minérale. Celle-ci est supplantée vers 1880 par la chimie organique (ou de synthèse) qui permet la création de colorants, de textiles artificiels. Des exemples des progrès de la chimie : la mise au point du nylon, des gaz de combat, des explosifs, dans le domaine pharmaceutique (l’entreprise Dupont de Nemours). Entre 1902 et 1918, 6 prix Nobel de chimie récompensent des allemands (Adolf von Bayer en 1905, Fritz Haber en 1918).
- Le nouveau système technique qu’est l’électricité émerge lentement. L’invention de la pile électrique de Volta date de 1760. Puis pendant les 2/3 du XIXe siècle on cantonne l'électricité aux seules lois de l’électromagnétisme. Il faut attendre la seconde moitié du XIXe siècle pour voir s'opérer un changement. En 1870 Zenob Gramme, invente la dynamo. A la même époque en France on invente le courant alternatif. L’avantage comparatif de l’électricité c’est son transport, elle est transmissible et polyvalente. Certains en sont effrayés un inconnu en 1880: « c’est une force démesurée excessive ». L’exposition internationale de l’électricité de Paris en 1881 est choisie comme symbole du début de la 2eme révolution industriel.
Les débuts de la communication ou la naissance de nouveaux médias
- La télégraphie électrique est inventée en Grande Bretagne et en France vers 1830/40, ses premières utilisations sont faites dans l’administration politique et au sein des grandes compagnies de chemin de fer. Son utilisation privée ne se développe véritablement qu'après 1870. Le téléphone quant à lui est une invention américaine avec deux grappes de brevets de Bell et Edison.
Dans le domaine des communications les Etats-Unis affirment leur suprématie ils regroupent les réseaux, les installations, et créaient des centraux téléphoniques à partir de 1910-1911. Les centraux Strowger permettent une automatisation des manoeuvres à effectuer pour relier les individus et donc de se passer des « dames du téléphone ».
- La radio est une invention italienne, elle a été réalisée par Marconi, il émigre en Grande Bretagne en 1896 dans le but de faire fortune et se vend là bas au plus offrant, ce sera la Royal Navy, on équipe progressivement la flotte anglaise puis les flottes mondiales. Grâce à Marconi la Grande Bretagne est en pointe dans ce secteur.
- Le cinéma. Les frères Lumières originaires de Lyon, ils créaient toutes les bases de l’industrie cinématographique. En 1896, ils inventent la pellicule puis commence à produire des films et les commercialisent. Le goulot d’étranglement fut commercial, ils diffusèrent des films en France mais ils n’ont pas eu la capacité de s’imposer à l’échelle internationale et ce sont les Etats-Unis qui triomphèrent en 1910.
Les difficultés de la transition industrielle en France et en Grande-Bretagne
L’essoufflement des secteurs traditionnels
- La Grande-Bretagne conserve son premier rang mondial pour la production de charbon, en 1913 elle produit 287 millions de tonnes, mais ce charbon est de moins en moins valorisé.
- La France a un goulot d’étranglement, ses gisements sont très coûteux et elle est contrainte d’importer la moitié de sa consommation de charbon.
- Pour le textile la situation est comparable en France et en Grande-Bretagne, seule la branche du coton continue à se développer, les autres branches: laine, lin et soie sont en crise importante.
Les industriels des deux pays maintiennent leur position dans le domaine de l’industrie mécanique, notamment dans celui du matériel ferroviaire. En France ce secteur est dominé par deux grandes entreprises, Schneider et la société alsacienne de construction mécanique qui change de nom en 1878 et devient Alstom.
Dans le domaine de la sidérurgie la concurrence par l’Allemagne et les Etats-Unis est de plus en plus rude. Quand on compare les chiffres de consommation d’acier on obtient pour l’année 1895 :
- Etats-Unis 10,5M tonnes
- Grande-Bretagne7,9M t
- Allemagne 7,6M t
- France 5,8M t
Une capacité d’innovation trop limitée dans les secteurs moteurs de la 2de industrialisation
- La chimie : la Grande-Bretagne est d’amblée dépassée, la France quant à elle essaie quelques percées sur certains créneaux notamment dans l’industrie pharmaceutique, dès 1914 il existe trois grandes entreprises dans ce secteur: Saint-Gobain, Alains Froges et Carnargues, Kuhlmann.
- En automobile : la France réalise une percée remarquable, en 1914 elle est le second constructeur automobile mondial derrière les Etats-Unis mais avec un net décalage. Elle a des inventeurs artisans de génie comme Panhard Levassor. Cette industrie était liée au départ au vélocipède et au monde sportif. La production d'automobiles en 1913 :
- Etats-Unis 111000 véhicules
- France 45000
- Grande-Bretagne 34000
- Pour les communications on retrouve encore l'idée que la France et la G.B sont présentes au départ lors du dépôt de brevet mais elles sont systématiquement devancées par la suite. Ainsi à partir de 1907 l’industrie du cinéma française est concurrencée par quelques grands groupes britanniques et américains et surtout après 1909 par les majors américains installés sur la côté Ouest à Hollywood.
La montée en puissance de l’innovation allemande
- Entre 1890 et 1914 l’Allemagne devient la seconde puissance économique mondiale et la première au niveau européen. Déjà à l’époque de la Prusse il y avait un plan de développement global: (qui concernait toute l'Allemagne même si elle n'était pas encore unifiée politiquement) la Realpolitik. L'objectif était de créer un grand marché intérieur à fort pouvoir d’achat, il est mis en place en 1834 : le Zollferein. On applique des thèses du protectionnisme éducateur de F.List après la visite de ce dernier aux Etats-Unis. Cette création d'un vaste marché intérieur densément peuplé et à fort pourvoir d’achat va permettre à l'Allemagne de devenir une puissance économique majeure.
Le dynamisme de la recherche par la mise en œuvre de nouvelles méthodes : le modèle de l’industrie chimique
- L’Allemagne devient la première puissance dans ce domaine. La chimie est au main de grandes entreprises : les Kartels (ce sont des oligopoles). Le premier d’entre eux est BASF fondé en 1865 et dont le responsable de la recherche fut E.Carce, il a développé une stratégie de laboratoire en liaison avec l’université de Berlin. Grâce à ce système organisationnel les premières teintures synthétiques furent mis au point . L’autre grande entreprise chimique allemande était à cet époque Bayer (fondée en 1861) et la troisième était Hoechst (créée en 1862.)
- Ces entreprises se partageaient le marché européen de la teinture. Elles ont des laboratoires extrêmement puissants qui entretiennent des liens forts entre recherche fondamentale et recherche appliquée. Ces entreprises ont aussi en aval une stratégie commerciale et publicitaire très active.