Tronc commun
Sommaire
- 1 Qu’est-ce que l’histoire contemporaine ?
- 2 Conclusion générale :
Qu’est-ce que l’histoire contemporaine ?
[on s’appuie sur le texte de Benedetto CROCE]
I. Le champ de l’Histoire contemporaine
A. Chronologie de la contemporanéité
B. Croce est un philosophe idéaliste italien de la fin du XIX° siècle, début XX° siècle ; on lui doit la célèbre maxime « Il n’y a d’histoire que contemporaine. » Les spécialistes d’épistémologie de l’Histoire sont très attachés à cette sentence. Tout historien est forcément contemporain, il juge à l’aune de son vécu.
La notion de modernité : quelle division chronologique de l’Histoire ?
-Histoire Ancienne : de la fin 476 avec la prise de Rome par Odoacre. Beaucoup font finir cette période au VI° siècle.
-Les historiens de la Renaissance comme Machiavel ont parlé d’un âge moyen entre la chute de Rome et la chute de Constantinople en 1453 : point de départ de l’histoire Moderne. Une période de pré-capitalisme (Braudel) se substitue à l’économie du troc.
-Pour la France, l’histoire contemporaine naît avec la Révolution française (1789 à nos jours) mais la notion de contemporanéité est très discutée. Cum temporaneus : « celui qui vit en même temps » : c'est-à-dire l’histoire que l’on est train de vivre et ses conséquences.
Pourquoi débuter avec la Révolution française ? Certains y voient un parti pris idéologique vers les années 1850 quand l’Ecole historique française (Ecole de la Revue Historique fondée en 1876 par Gabriel Monod) a envisagé l’histoire contemporaine commençant avec la Révolution, celle-ci est le point de départ d’un monde nouveau. D’autres y voient la possibilité par les derniers contemporains de la période révolutionnaire, vers les années 1880, de raconter cette période (on applique le principe cum temporaneus : la Révolution fait partie de leur vécu). Ainsi, les observateurs d’épistémologie évoquent la contemporanéité vers 1876-1880 car elle se prolonge dans ces années-là.
Mais, cette conception est confrontée à quelques limites :
1) Actuellement, l’historiographie est double sur la Révolution française ; certains y voient une novation, d’autres y voient une continuité.
Ex : Tocqueville, L’Ancien Régime et la Révolution, la Révolution ne fait que prolonger l’Ancien Régime, elle et une étape supplémentaire dans l’accomplissement de l’œuvre de l’Ancien Régime. Tous les acteurs de la Révolution avaient vécu sous l’Ancien Régime. Par exemple, le régime de type sacral qui commençait à se réformer sous Louis XV, avec la réforme Maupeou ; l’édit de tolérance protestant ; Louis XVI, réformes de Turgot, de Necker…, est appliqué avec la Révolution.
La Révolution française est-elle donc un point de départ ou une simple étape ? Tout dépend de la durée que l’on accorde à l’étendue et au champ de l’analyse historique. La Révolution française doit être comprise dans l’évolution plus longue pour beaucoup de domaines sans tomber dans la « longue durée » (Braudel). Elle fut surtout une révolution politique et une révolution des valeurs mais fut-elle novatrice ? Oui, si on considère que la Révolution apporte des notions nouvelles : elle peut être le début d’une ère nouvelle, de l’ère contemporaine.
Ex : La DDHC : ce n’est pas une nouveauté en soi, beaucoup l’avaient pressenti comme le christianisme. La nouveauté est qu’on ajoute à ces droits, la notion de « citoyen » qui a des devoirs=> apport d’une nouveauté mondiale.
Aujourd’hui, l’historiographie actuelle voudrait aller jusqu’aux années 1850-1880. La date communément retenue est 1815 avec l’apparition du prolétariat et la Révolution Industrielle. La Révolution n’est pratiquement plus la base de l’histoire contemporaine, pas même l’Empire, si, comme dans ce cas là, on prend en considération la question sociale. Cf : Georges Dupreux qui étudie la Société française, passage excellent sur le XIX° siècle. Après la Révolution, il constate que la société est divisée entre les « victimes » et les « bénéficiaires », parmi eux ceux qui ont acquis les biens nationaux.
2) Jusqu’à quand peut-on parler d’histoire contemporaine ?
A partir d’une certaine date, on a dit que l’histoire contemporaine se confond avec le journalisme, la sociologie, la politologie : l’histoire très récente relève de ces trois approches. Les politologues estimaient que 50 avant notre époque, on peut étudier un événement en temps qu’histoire. Aujourd’hui, il y une méthodologie de l’histoire pour le temps très actuel appelée « l’histoire immédiate » puis « histoire du temps présent » avec l’IHTP qui aborde la question du XX° siècle encore en cours. La spécificité de l’histoire du temps présent est qu’elle se sert comme point d’appui de la presse.
Ce sont des limites fortes qui engagent des points de vue épistémologiques, politiques…
La notion de contemporanéité sous-tend les problèmes des autres pays que la France : les dates évoquées sont-elles universelles ou existe-t-il des dates propres à chaque pays ?
Ex : En Espagne, l’époque contemporaine débute en 1808.
- En Italie, les profs d’histoire contemporaine sont aussi profs de science politique.
B. Quelques points de vocabulaire
¨
- « époque » : point fixe et déterminé dans le temps ; événement marquant servant de point de départ à une chronologie particulière ; elle peut-être une période définie par un événement important, un style, un homme important…
ex : « c’est à l’époque de Pompidou… » a-t-il pour autant caractérisé un style ? une ère ? ex : « époque romantique » avec une notion de chronologie ex : « style d’époque » sous-entend l’idée de noblesse ex : Belle-Epoque
¨
- « période » : espace de temps important qui marque l’histoire (soit général ; soit marqué par tel ou tel point).
ex : « période romantique » : notion plus vague. « périodisation » : terme scientifique : comment diviser un sujet par périodes ? ex : quelle est la périodisation de l’ère gaullienne ?, mais on ne peut pas diviser une époque. C’est J. B DUROSELLE qui, le premier, a l’idée de réfléchir sur ces termes.
¨
- « temps » : suite d’éléments qui donne une continuité à une société donnée.
Ex : temps contemporains : période ou époque Ex : la vie quotidienne au temps de… Ex : in illo tempore dans les Evangiles : magnification de ce temps.
¨
- « siècle » : peut être caractérisé par tel ou tel personnage
ex : le « siècle de Périclès »
¨
- « moment » : événement en histoire contemporaine
ex : le moment De Gaulle (1958) espace limité par rapport au fait qui le caractérise ex : Verdun : moment du Général Pétain.
C. Les champs de recherche
1. Quelle concrétisation de la recherche en contemporaine ?
Cf : les sujets des grands revues : XX° siècle, Revue Historique, Revue internationale.. évoquent les grandes tendances de la recherche. Surtout le Bulletin de l’Association des Professeurs d’Histoire et de Géographie qui présente les programmes d’Agrég et du CAPES, montre de véritables sujets de recherche et une certaine inventivité des sources.
Ex de sujets : nations, nationalismes, nationalités XIX°-XX° siècles. On en profite pour mettre en valeur toutes les recherches faites sur ces notions.
Ex : religion et culture en Europe occidentale du XIX° siècle à 1914 : recherche très active dans le domaine de la prosopographie, papauté, art, culture…
Ex : sociétés, guerres et paix (1911-1946) ; bibliographie publiée dans Historiens et Géographes. A l’origine de cette question, Annette Beckel (Paris X Nanterre), mais le concept a été inventé par Mossé, la conclusion du premier conflit mondial prépare le second, cf. paix injuste. Selon Mossé, il faut parler de « brutalisation des sociétés » pendant le premier conflit mondial.
L’aspect international, européen n’a pas beaucoup été travaillé sauf les pays comme la France, L’Allemagne, l’Angleterre, l’Italie pour l’histoire médiévale. L’Espagne a été étudiée avec la notion de nations, nationalités, nationalisme… mais pas avec la religion (cf : Inquisition).
Vision nouvelle, la recherche est rarement faite sur des pays étrangers et elle est rarement comparative.
Etude du texte de Benedetto CROCE : les historiens français n’aimaient pas l’historiographie, elle est longtemps négligée dans les travaux. A l’inverse, en Italie, on se place toujours dans l’historiographie. En France, l’historiographie appartient à une approche historique. Les courants historiques ne sont pas toujours définis. Un des premiers historiens français à s’y être intéressé est Camille Jullian qui avait publié les grands textes des grands historiens. L’historiographie doit être comprise comme des apports successifs de l’histoire à la vérité.
L’histoire contemporaine met en route l’historien qui va faire de l’historiographie, il rend contemporaine l’histoire qu’il écrit. Toute histoire est contemporaine dans la mesure où elle se fait dans l’action et toute histoire est action. L’histoire ne serait pas accomplie et se continuerait sans cesse.
L 21-24 : si l’histoire n’est pas narrative, elle n’est qu’une collection de documents (Ecole méthodiste, ce à quoi s’oppose l’Ecole des Annales. L’histoire est une vue de l’esprit, son discours est fondé sur les faits, à l’inverse de la philosophie. On ne peut appréhender que ce qui s’offre à nous mais que nous cherchons aussi. L’historien connaissant le résultat cherche les origines.
Quelles est donc la place de l’historien,de l’observateur ?
L 29-30 : Cicéron : « L’histoire est maîtresse de vie ». La France est très marquée dans sa politique par l’histoire.
2. Dans quel sens les recherches peuvent-elles s’orienter ?
La réflexion historiographique aux XIX° et XX° siècles connaît de grandes étapes. Pendant longtemps, l’histoire a été chronologique, fondée sur l’imagination, sur des sources officielles. Puis au XIX° siècle, à la suite de Michelet, de Quinet, de Renan, il y a un retour aux sources. Ensuite, phase de l’histoire positiviste ou objective fondée sur le document et surtout sur les documents objectifs sur lesquels, il était possible de travailler : comme les archives mais il y certaines limites, il s’agit de trouver les bonnes. L’histoire positiviste admettait l’archéologie à condition qu’elle soit critiquée, pour l’histoire ancienne, on a l’épigraphie.
Langlois et Seignobos : méthode d’étude du texte historique. Au début de XX° siècle, il y a un rapprochement entre les historiens et les autres sciences humaines. Michelet commence son Histoire de France par un tableau géographique (idem pour Labrousse). Durkheim et Simiand : la recherche historique se fait dans l’interdisciplinarité. Le mouvement s’épanouit avec l’Ecole des Annales (Febvre et Bloch) : l’histoire doit être plus vaste que les simples archives (témoignages oraux et légendes doivent être pris en compte) et aboutir aux comportements collectifs, à l’histoire des mentalités. Aujourd’hui, l’histoire des mentalités est très en vogue. Selon, Michelet, l’histoire est « la reconstruction intégrale du passé », y compris donc les aspects sociologiques.
Après les Annales, on a jeté l’anathème contre l’histoire événementielle ou l’ « histoire-bataille ». C’est le grand moment de l’histoire quantitative ou sérielle.
Aujourd’hui, on constate un retour à un kaléidoscope des recherches historiques : l’histoire économique est tout à la fois une histoire globale, un phénomène explicatif. L’histoire des mentalités est celle des comportements collectifs, elle regroupe plusieurs champs dont l’histoire sociale.
L’histoire culturelle étudie les réseaux culturels et l’histoire de la civilisation d’une société (Ory, Sirinelli développent la notion d’histoire des « générations »). On constate en outre, un renouveau de l’histoire politique qui avait été négligé (on s’appuyait sur les résultats d’élections), le genre biographique, longtemps décrié, est réhabilité par René Rémond (histoire des droites) ; Jean Marie Mayeur (thèse d’Etat sur l’abbé Lemire, prêtre démocrate, député du Nord).
L’histoire des relations internationales (la catégorie de l’histoire diplomatique se rattache à tout) : Renouvain, Duroselle, Vaisse : c’est un genre particulier qui appartient à la fois au politique, au culturel et aux mentalités.
Histoire religieuse.
II. La recherche en histoire contemporaine
A. Les secteurs de recherche
- Histoire de l’industrialisation (Alexandre Fernadez).
- Histoire du livre, appartient à la catégorie de l’histoire culturelle, très répandue en histoire contemporaine car elle prolonge l’intuition de Febvre et Bloch pour qui les sources n’étaient pas uniquement archivistiques. Aujourd’hui les principaux représentants de cette histoire culturelle sont J.F Sirinelli, auteur de Pour une histoire culturelle, et P. Ory et C. Charle, à qui on doit des ouvrages sur les élites.
L’histoire culturelle contemporaine comprend de nouvelles catégories comme l’histoire des comportements ou des représentations, cf. « Pour une histoire culturelle du contemporain » d’Ory in Revue d’Histoire contemporaine (1992). Alain Corbin est l’auteur d’une méthodologie de l’histoire culturelle ; Maurice Agulhon, quant à lui a travaillé sur les conséquences de 1848 dans son ouvrage La République au village.
- Histoire religieuse est un des sous-axes du Centre d’Etudes des Mondes Moderne et Contemporain (CEMMC). Les axes majeurs étudiés dans ce centre sont les axes politiques, économiques, sociaux et religieux. L’histoire religieuse a longtemps été négligé par les chercheurs et les étudiants. Ce phénomène est peut être dû à la tradition et l’attitude laïques du pays. En histoire moderne, étudier l’histoire religieuse ne pose pas de problème car elle comprise comme permettant des apports à l’histoire culturelle.
L’histoire religieuse contemporaine peut correspondre à plusieurs définitions. Elle n’est pas une histoire confessionnelle (c'est-à-dire l’histoire d’une confession qui peut être, en outre, étudiée de plusieurs manières ; manière objective de l’historien ; manière subjective, j’étudie l’histoire de ma religion en temps que fidèle). Elle n’est pas non plus une histoire sainte, ni celle d’une seule religion. En France, cela peut poser quelques problèmes car le pays est majoritairement catholique, les seules minorités (protestantisme et judaïsme) sont peu actives donc peu étudiées. Aujourd’hui, l’historien du contemporain va devoir parler de l’influence de l’islam en France mais uniquement depuis quelques années. Ainsi, l’histoire religieuse ne se contente pas d’une seule religion, il est donc difficile de cerner les limites d’étude. NB : le terme d’histoire des religions sous-tend l’étude des religions au niveau mondial, une étude comparative qui utilise l’instrument sociologique, anthropologique et ethnographique.
Ex : chez Gallimard, La Pléiade, L’histoire des religions, retrace les différentes religions depuis les Chamanistes, jusqu’aux Aztèques… Le tome deux est consacré aux religions dites du Salut c'est-à-dire le christianisme, le judaïsme et l’islam. Ces dernières appliquent ce que G. Dumezil appelle la « trilogie des sociétés indo-européennes », distinguant ainsi ceux qui prient (oratores), de ceux qui combattent (bellatores), de ceux qui travaillent (laboratores).
Cette approche scientifique donne une dimension religieuse à l’histoire des sociétés et notamment de la société française. L’histoire religieuse a même été longtemps étudiée en parallèle à l’histoire politique, au XIX° siècle, ces domaines étaient en effet très liés. L’histoire religieuse est une approche importante des autres secteurs. Pour Fernand Braudel, « La religion est le cœur lourd des sociétés » in Grammaire des civilisations.
B. Les approches de l’histoire religieuse
1. Approche polémique :
- Chanoine Louis Capéran (diocèse de Toulouse) est l’auteur d’une Histoire générale de la laïcité, du Triomphe de la laïcité. Ce sont des ouvrages engagés. Beaucoup d’historiens reprennent ses propos. Toute l’histoire contemporaine est marquée par ces combats entre religion et laïcité.
- Quel regard ont eu les catholiques sur la Révolution ? Ce regard était très critique. Au XIX° siècle, la tradition soutient que la Révolution a persécuté l’Eglise. Edouard Quinet a écrit des ouvrages sur cette période, mais ses ouvrages sont plus des essais philosophiques, des critiques de l’Eglise.
- Avec Ernest Renan, titulaire de la chaire de l’histoire des religions, est créée, en France, une école qui cherche à donner une vision plus objective de l’histoire de la religion.
Dans l’entre deux guerre, et à la fin de la Seconde Guerre mondiale, à la Sorbonne, les thèses sur l’histoire religieuse sont peu nombreuses, elles sont effectuées surtout par des prêtres venus de l’Institut National Catholique de Paris. Leurs travaux s’apparentent plutôt à des thèses de théologie.
2. L’apparition des écoles
Avec Paul Renouvin, des travaux et des thèses sur l’histoire religieuse contemporaine sont lancés. L’école menée par Paul Renouvin associe Histoire internationale et histoire culturelle. Elle se différencie de l’école positiviste (Labrousse), qui s’appuie sur des études économiques et sociales.
André Latreille a fait sa thèse sur la religion et la Révolution. Démocrate chrétien, après guerre, il a en charge les affaires religieuses. Il lance une école à Lyon qui donne naissance à toute une catégorie de gens qui vont désormais s’intéresser à l’histoire religieuse.
3. La « révolution » de 1952
L’éditeur de la collection Fliche et Martin, spécialisée dans l’histoire religieuse des origines à Pie IX, publie bon nombre d’ouvrages sur ce thème. C’est dans cette collection qu’a lieu la « révolution ».
Cette histoire cesse en 1846 avec le Chanoine Leflon. Personne n’ose s’attaquer à la période qui suit 1846 (date de l’élection de Pie IX) car les archives du Vatican étaient closes. Seul le Chanoine belge Aubert retrace la vie de Pie IX (1846-1872). Il a effectué son travail sans archives, en s’appuyant uniquement sur des articles de presse, des livres, des mémoires et les archives des autres pays. Il publie son travail en 1952. Après l’ouverture des archives du Vatican, il n’est pas nécessaire de modifier l’ouvrage. Une étape essentielle a été franchie.
Apparaît dès lors une nouvelle école, dont le principal représentant est J.B. Duroselle, auteur de la thèse sur Les origines du catholicisme social en France au XIX° siècle. René Rémond, quant à lui, n’est pas uniquement spécialiste de l’histoire des droites en France, publie des ouvrages sur les grands courants religieux français dans l’entre-deux-guerres.
Une nouvelle génération d’historiens porte son intérêt pour l’Eglise de France. J. Gadille travaille sur l’épiscopat sous la III° République, J.M. Mayeur a fait sa thèse sur l’abbé Lemire… Les études des diocèses sont l’œuvre des célèbres Cholvy et Hilaire ; E. Fouilloux, quant à lui, est spécialiste de l’oecuménisme et du discours théologique ; Ph ; Levillain a effectué sa thèse sur Albert de Mun et a dirigé le dictionnaire historique de la papauté chez Fayard ; Ph. Boutry a travaillé sur la Curie romaine au XIX° siècle. L’Ecole de Lyon, avec J.D.Durand, se spécialise sur l’histoire de l’Eglise italienne pendant la Seconde Guerre mondiale. L’histoire du protestantisme est étudiée par A. Encrevé (Université de Paris) et P. Cabanel (Toulouse II Le Mirail).
C. L’histoire des relations internationales
Son étude est contestée par l’Ecole des Annales et définie comme étant une histoire-bataille. Les grandes forces diplomatiques n’étaient pas étudiées. Les grands hommes, en revanche, l’étaient un peu plus : Talleyrand, Briand…
L’histoire-bataille est devenue l’histoire de la diplomatie puis on passe à l’histoire des relations internationales.
Cf. La Revue des relations internationales de P. Renouvin, expert du gouvernement français pour l’évaluation de la Première Guerre mondiale (spécialiste de la Question d’Orient au XIX° siècle). Il avait conclu à la culpabilité de l’Allemagne dans le déclenchement du conflit. Il est à l’origine de la collection Histoire des relations internationales chez Hachette dans les années 1960, la problématique de cette histoire et de distinguer les forces profondes des forces réelles.
Son travail porte surtout sur la période précédent 1945. Son école, fondée après guerre, est relayée par J.B. Duroselle, auteur du manuel Histoire diplomatique (1815 à nos jours), et co-auteur de l’ouvrage Introduction à l’histoire des relations internationales avec Renouvin. Aujourd’hui, l’histoire des relations internationales est un secteur important de la recherche. M. Vaisse est spécialiste avec Poitevin de l’histoire des relations franco-allemandes, sur la période du désarmement notamment dans les années 1020-1930.
Etude du texte de Renouvin :
Le texte comporte deux grandes parties :
- 1) l’auteur décrit l’ancienne méthode pour analyser l’histoire des relations internationales qui s’appuyait sur les intérêts politiques et les hommes diplomatiques (ministres des affaires étrangères, Présidents de la République qui appliquent la fonction noble et régalienne de l’Etat.)
- 2) La nouvelle tendance veut qu’on travaille plus sur les « forces profondes » avec les rapports entres les peuples, les rapports entre les Etats et les peuples. Les forces sous-jacentes sont tout aussi pertinentes à étudier, les événements ne doivent pas non plus être négligés. Il n’est, en effet, pas possible de faire de l’histoire désincarnée, les hommes sont à l’origine des événements (cf. les enjeux autour du Rhin considérés comme une « agitation de surface », témoin de ce qui se passaient dans les forces profondes.)
L’auteur confronte donc deux thèses non contradictoires mais bien complémentaires : -beaucoup d’événements peuvent s’expliquer par la géographie, la civilisation, les structures économiques, les changements… -les forces profondes intellectuelles et passionnelles sont aussi des éléments de réponse à prendre en compte.
III. Les sources spécifiques de l’histoire contemporaine
- L’histoire orale est acceptée si elle est codifiée.
- L’opinion publique est la force inconsciente de la démocratie, elle est la résultante de beaucoup de choses notamment des sondages. Ces derniers ont été inventé par l’Américain Gallup. Dans De Wilson à Roosevelt, essai sur la politique étrangère des Etats-Unis, J.B. Duroselle explique que Roosevelt suit ces sondages pour savoir si le pays doit sortir ou non de sa neutralité. Les sondages mêlent méthode de représentations et méthode mathématique. En France, l’IFOP fut mis en place par un prof de sciences po, J. Stoetzel, qui lance les premiers sondages.
Pour l’historien, la presse est une source avérée en histoire contemporaine. Mais ce support comporte quelques limites : ne risque-t-on pas de retrouver l’opinion du journaliste plutôt que celle des gens ? Ce risque renvoie à une question plus générale et fort importante : à partir de la presse, peut-on faire de l’histoire ?
A condition d’adopter une attitude stricte, la presse peut être source incontestable d’Histoire, surtout la presse écrite. Cependant, il convient de distinguer la presse quotidienne de la presse à réflexion (revues…). Avec ces dernières, on a des éléments de connaissance mais il manque la spontanéité de l’événement. Il est nécessaire d’adopter une attitude critique et de savoir que les journalistes apportent une réflexion personnelle et des informations qui permettent de faire de l’Histoire. Ex : La Revue des Deux Mondes.
La presse quotidienne peut-elle être source d’Histoire ou de connaissance de l’opinion publique ? comme les sondages ? Il est possible, au moins jusqu’aux années 1960-1970, au moment ou la TV a pris le pas sur la presse (cf : De Gaulle), d’analyser la presse comme reflet de l’opinion publique. Comment aborder cette presse ?
-pour la construction des faits historiques
-pour atteindre les grands courants de l’opinion
Donc, en d’autres termes, faire une analyse qualitative (méthode rigoureuse de l’historien) ou quantitative (étude de la vérité de l’opinion, étude sociologique du journal) ?
- -analyse qualitative : option principale : connaître le journal (quelle est sa tendance ?) : qui parles ? à quel public ? dans quel but ? avec quel résultat ?
Ces questions permettent de connaître la nature du journal et de l’information (est-ce un éditorial, un article de tête, une dépêche d’agence, un grand reportage, envoi d’un reporter permanent ou exceptionnel ?), de même les dessins satiriques qui remplacent les billets d’humeur sont à la fois l’expression de l’éditorial, du dessinateur, de l’opinion ? Le journal s’adresse au grand public ou à un public captif (journaux comme L’Huma ou la Croix) ? Le journal est-il vecteur de l’opinion ? cf : le Nouvel Obs (gauche intellectuelle) est un des rares journaux à avoir publié dans ses colonnes la pétition des médecins voulant la légalisation de l’euthanasie.
- -analyse quantitative : calcul de l’espace rédactionnel en mesurant la surface qui lui est réservée, de même calcul de la surface réservée à tel type de sujet. Cette analyse, fastidieuse, permet de connaître l’importance accordée à un sujet dans un ensemble de journaux. Ce type d’analyse est aussi très employé dans l’étude des discours politiques (cf : occurrence des termes).
Conclusion générale :
La Révolution est vue comme une charnière entre histoire moderne et contemporaine. La place des événements dans l’histoire d’un pays, dans la naissance présumée de l’histoire contemporaine est propre à chaque nation et ne peut être généralisée. Cf : historiographie de la Révolution : vue par les contemporains, par les universitaires (Aulard, Mathiez : la Révolution est fondatrice de la France contemporaine, à l’inverse pour Tocqueville et Taine, Ancien Régime et Révolution ne font qu’un). Avec François Furet, le regard sur la Révolution et les sociétés de pensée lance une vaste question sur la Révolution comme début de la contemporanéité ou est-ce uniquement une vision française ?