Agostino UE4 4ème cours 09/02/07

De Univ-Bordeaux

II. La recherche en histoire contemporaine

A. Les secteurs de recherche

  • Histoire de l’industrialisation (Alexandre Fernadez).
  • Histoire du livre, appartient à la catégorie de l’histoire culturelle, très répandue en histoire contemporaine car elle prolonge l’intuition de Febvre et Bloch pour qui les sources n’étaient pas uniquement archivistiques. Aujourd’hui les principaux représentants de cette histoire culturelle sont J.F Sirinelli, auteur de Pour une histoire culturelle, et P. Ory et C. Charle, à qui on doit des ouvrages sur les élites.

L’histoire culturelle contemporaine comprend de nouvelles catégories comme l’histoire des comportements ou des représentations, cf. « Pour une histoire culturelle du contemporain » d’Ory in Revue d’Histoire contemporaine (1992). Alain Corbin est l’auteur d’une méthodologie de l’histoire culturelle ; Maurice Agulhon, quant à lui a travaillé sur les conséquences de 1848 dans son ouvrage La République au village.

  • Histoire religieuse est un des sous-axes du Centre d’Etudes des Mondes Moderne et Contemporain (CEMMC). Les axes majeurs étudiés dans ce centre sont les axes politiques, économiques, sociaux et religieux. L’histoire religieuse a longtemps été négligé par les chercheurs et les étudiants. Ce phénomène est peut être dû à la tradition et l’attitude laïques du pays. En histoire moderne, étudier l’histoire religieuse ne pose pas de problème car elle comprise comme permettant des apports à l’histoire culturelle.

L’histoire religieuse contemporaine peut correspondre à plusieurs définitions. Elle n’est pas une histoire confessionnelle (c'est-à-dire l’histoire d’une confession qui peut être, en outre, étudiée de plusieurs manières ; manière objective de l’historien ; manière subjective, j’étudie l’histoire de ma religion en temps que fidèle). Elle n’est pas non plus une histoire sainte, ni celle d’une seule religion. En France, cela peut poser quelques problèmes car le pays est majoritairement catholique, les seules minorités (protestantisme et judaïsme) sont peu actives donc peu étudiées. Aujourd’hui, l’historien du contemporain va devoir parler de l’influence de l’islam en France mais uniquement depuis quelques années. Ainsi, l’histoire religieuse ne se contente pas d’une seule religion, il est donc difficile de cerner les limites d’étude. NB : le terme d’histoire des religions sous-tend l’étude des religions au niveau mondial, une étude comparative qui utilise l’instrument sociologique, anthropologique et ethnographique.

Ex : chez Gallimard, La Pléiade, L’histoire des religions, retrace les différentes religions depuis les Chamanistes, jusqu’aux Aztèques… Le tome deux est consacré aux religions dites du Salut c'est-à-dire le christianisme, le judaïsme et l’islam. Ces dernières appliquent ce que G. Dumezil appelle la « trilogie des sociétés indo-européennes », distinguant ainsi ceux qui prient (oratores), de ceux qui combattent (bellatores), de ceux qui travaillent (laboratores).

Cette approche scientifique donne une dimension religieuse à l’histoire des sociétés et notamment de la société française. L’histoire religieuse a même été longtemps étudiée en parallèle à l’histoire politique, au XIX° siècle, ces domaines étaient en effet très liés. L’histoire religieuse est une approche importante des autres secteurs. Pour Fernand Braudel, « La religion est le cœur lourd des sociétés » in Grammaire des civilisations.

B. Les approches de l’histoire religieuse

1. Approche polémique :

  • Chanoine Louis Capéran (diocèse de Toulouse) est l’auteur d’une Histoire générale de la laïcité, du Triomphe de la laïcité. Ce sont des ouvrages engagés. Beaucoup d’historiens reprennent ses propos. Toute l’histoire contemporaine est marquée par ces combats entre religion et laïcité.
  • Quel regard ont eu les catholiques sur la Révolution ? Ce regard était très critique. Au XIX° siècle, la tradition soutient que la Révolution a persécuté l’Eglise. Edouard Quinet a écrit des ouvrages sur cette période, mais ses ouvrages sont plus des essais philosophiques, des critiques de l’Eglise.
  • Avec Ernest Renan, titulaire de la chaire de l’histoire des religions, est créée, en France, une école qui cherche à donner une vision plus objective de l’histoire de la religion.

Dans l’entre deux guerre, et à la fin de la Seconde Guerre mondiale, à la Sorbonne, les thèses sur l’histoire religieuse sont peu nombreuses, elles sont effectuées surtout par des prêtres venus de l’Institut National Catholique de Paris. Leurs travaux s’apparentent plutôt à des thèses de théologie.

2. L’apparition des écoles

Avec Paul Renouvin, des travaux et des thèses sur l’histoire religieuse contemporaine sont lancés. L’école menée par Paul Renouvin associe Histoire internationale et histoire culturelle. Elle se différencie de l’école positiviste (Labrousse), qui s’appuie sur des études économiques et sociales.

André Latreille a fait sa thèse sur la religion et la Révolution. Démocrate chrétien, après guerre, il a en charge les affaires religieuses. Il lance une école à Lyon qui donne naissance à toute une catégorie de gens qui vont désormais s’intéresser à l’histoire religieuse.

3. La « révolution » de 1952

L’éditeur de la collection Fliche et Martin, spécialisée dans l’histoire religieuse des origines à Pie IX, publie bon nombre d’ouvrages sur ce thème. C’est dans cette collection qu’a lieu la « révolution ».

Cette histoire cesse en 1846 avec le Chanoine Leflon. Personne n’ose s’attaquer à la période qui suit 1846 (date de l’élection de Pie IX) car les archives du Vatican étaient closes. Seul le Chanoine belge Aubert retrace la vie de Pie IX (1846-1872). Il a effectué son travail sans archives, en s’appuyant uniquement sur des articles de presse, des livres, des mémoires et les archives des autres pays. Il publie son travail en 1952. Après l’ouverture des archives du Vatican, il n’est pas nécessaire de modifier l’ouvrage. Une étape essentielle a été franchie.

Apparaît dès lors une nouvelle école, dont le principal représentant est J.B. Duroselle, auteur de la thèse sur Les origines du catholicisme social en France au XIX° siècle. René Rémond, quant à lui, n’est pas uniquement spécialiste de l’histoire des droites en France, publie des ouvrages sur les grands courants religieux français dans l’entre-deux-guerres.

Une nouvelle génération d’historiens porte son intérêt pour l’Eglise de France. J. Gadille travaille sur l’épiscopat sous la III° République, J.M. Mayeur a fait sa thèse sur l’abbé Lemire… Les études des diocèses sont l’œuvre des célèbres Cholvy et Hilaire ; E. Fouilloux, quant à lui, est spécialiste de l’oecuménisme et du discours théologique ; Ph ; Levillain a effectué sa thèse sur Albert de Mun et a dirigé le dictionnaire historique de la papauté chez Fayard ; Ph. Boutry a travaillé sur la Curie romaine au XIX° siècle. L’Ecole de Lyon, avec J.D.Durand, se spécialise sur l’histoire de l’Eglise italienne pendant la Seconde Guerre mondiale. L’histoire du protestantisme est étudiée par A. Encrevé (Université de Paris) et P. Cabanel (Toulouse II Le Mirail).

C. L’histoire des relations internationales

Son étude est contestée par l’Ecole des Annales et définie comme étant une histoire-bataille. Les grandes forces diplomatiques n’étaient pas étudiées. Les grands hommes, en revanche, l’étaient un peu plus : Talleyrand, Briand…

L’histoire-bataille est devenue l’histoire de la diplomatie puis on passe à l’histoire des relations internationales.

Cf. La Revue des relations internationales de P. Renouvin, expert du gouvernement français pour l’évaluation de la Première Guerre mondiale (spécialiste de la Question d’Orient au XIX° siècle). Il avait conclu à la culpabilité de l’Allemagne dans le déclenchement du conflit. Il est à l’origine de la collection Histoire des relations internationales chez Hachette dans les années 1960, la problématique de cette histoire et de distinguer les forces profondes des forces réelles.

Son travail porte surtout sur la période précédent 1945. Son école, fondée après guerre, est relayée par J.B. Duroselle, auteur du manuel Histoire diplomatique (1815 à nos jours), et co-auteur de l’ouvrage Introduction à l’histoire des relations internationales avec Renouvin. Aujourd’hui, l’histoire des relations internationales est un secteur important de la recherche. M. Vaisse est spécialiste avec Poitevin de l’histoire des relations franco-allemandes, sur la période du désarmement notamment dans les années 1020-1930.

Etude du texte de Renouvin : Cliquez sur l'image pour avoir la taille originale


Le texte comporte deux grandes parties :

  • 1) l’auteur décrit l’ancienne méthode pour analyser l’histoire des relations internationales qui s’appuyait sur les intérêts politiques et les hommes diplomatiques (ministres des affaires étrangères, Présidents de la République qui appliquent la fonction noble et régalienne de l’Etat.)
  • 2) La nouvelle tendance veut qu’on travaille plus sur les « forces profondes » avec les rapports entres les peuples, les rapports entre les Etats et les peuples. Les forces sous-jacentes sont tout aussi pertinentes à étudier, les événements ne doivent pas non plus être négligés. Il n’est, en effet, pas possible de faire de l’histoire désincarnée, les hommes sont à l’origine des événements (cf. les enjeux autour du Rhin considérés comme une « agitation de surface », témoin de ce qui se passaient dans les forces profondes.)

L’auteur confronte donc deux thèses non contradictoires mais bien complémentaires : -beaucoup d’événements peuvent s’expliquer par la géographie, la civilisation, les structures économiques, les changements… -les forces profondes intellectuelles et passionnelles sont aussi des éléments de réponse à prendre en compte.

III. Les sources spécifiques de l’histoire contemporaine

  • L’histoire orale est acceptée si elle est codifiée.
  • L’opinion publique est la force inconsciente de la démocratie, elle est la résultante de beaucoup de choses notamment des sondages. Ces derniers ont été inventé par l’Américain Gallup. Dans De Wilson à Roosevelt, essai sur la politique étrangère des Etats-Unis, J.B. Duroselle explique que Roosevelt suit ces sondages pour savoir si le pays doit sortir ou non de sa neutralité. Les sondages mêlent méthode de représentations et méthode mathématique. En France, l’IFOP fut mis en place par un prof de sciences po, J. Stoetzel, qui lance les premiers sondages.

Pour l’historien, la presse est une source avérée en histoire contemporaine. Mais ce support comporte quelques limites : ne risque-t-on pas de retrouver l’opinion du journaliste plutôt que celle des gens ? Ce risque renvoie à une question plus générale et fort importante : à partir de la presse, peut-on faire de l’histoire ?